chambre criminelle
Audience publique du mardi 22 janvier 2013
N° de pourvoi: 12-87199
Publié au bulletin Cassation sans renvoi
M. Louvel (président), président
SCP Piwnica et Molinié, avocat(s)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. José X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel
de GRENOBLE, en date du 23 octobre 2012, qui, dans la procédure
suivie contre lui des chefs de viol aggravé et séquestration, a
rejeté sa demande de mise en liberté ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des
articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de
l'homme, préliminaire, 135-2, 379-2, 379-4, 591 et 593 du code
de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a jugé que M. X... était détenu en
vertu d'un titre régulier et a rejeté sa demande de mise en
liberté :
"aux motifs que, sur l'existence en l'espèce d'un titre de
détention, il est constant que M. X..., étant sous contrôle
judiciaire, a comparu libre devant la cour d'assises de la
Drôme, mais s'est enfui au cours des débats qui se déroulaient
les 2 et 3 avril 2012 ; que, conformément aux dispositions de
l'article 379-2 du code de procédure pénale, la cour d'assises
de la Drôme a décidé du renvoi de l'affaire à une session
ultérieure, après avoir décerné mandat
d'arrêt contre l'accusé ; que, selon l'article 379-4 du code de
procédure pénale, le mandat
d'arrêt délivré contre l'accusé en application de l'article
379-3 ou décerné avant l'arrêt de condamnation vaut
mandat de dépôt et l'accusé
demeure détenu jusqu'à sa comparution devant la cour d'assises,
qui doit intervenir dans le délai prévu par l'article 181 à
compter de son placement en détention, faute de quoi il est
immédiatement remis en liberté ; que tel est bien le cas de M.
X... qui s'est vu infliger un mandat
d'arrêt après l'ouverture des débats devant la cour d'assises,
mais avant toute décision de condamnation, de telle sorte que
ledit mandat vaut
mandat de dépôt à son encontre et
que le juge des libertés et de la détention était incompétent
pour réformer ou apprécier la validité du titre de détention
émis par la cour d'assises, l'article 135-2 du code de procédure
pénale n'étant pas applicable au cas d'espèce ; qu'en
conséquence, il convient de constater que M. X... est détenu en
vertu d'un titre de détention valide et régulier en la forme ;
"alors que le mandat d'arrêt
décerné en vertu de l'article 379-2 du code de procédure pénale
lorsque la cour d'assises décide, en l'absence de l'accusé, de
renvoyer l'affaire à une session ultérieure, n'est pas visé par
l'article 379-4 du code de procédure pénale et ne vaut pas
mandat de dépôt ; que la personne
arrêté en exécution d'un tel mandat
doit donc être présentée au juge des libertés et de la détention
qui peut ordonner sa détention jusqu'à sa comparution ; que M.
X..., arrêté en exécution d'un mandat
décerné par la cour d'assises qui avait renvoyé l'affaire à une
audience ultérieure, et qui n'a pas été présenté à un juge des
libertés après cette arrestation, est donc détenu sans titre" ;
Vu l'article 135-2 du code de procédure pénale ;
Attendu quil résulte de ce texte que lorsqu'une personne faisant
l'objet d'un mandat d'arrêt est
découverte après le règlement de l'information et avant toute
condamnation à une peine privative de liberté, elle doit être
présentée au juge des libertés et de la détention qui statue sur
son éventuel placement en détention provisoire ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la
procédure que M. X... a été, par arrêt du 21 juillet 2010,
renvoyé devant la cour d'assises de la Drôme des chefs de viols
avec arme, enlèvement et séquestration suivie d'une libération
avant le septième jour ; qu'alors que l'affaire était examinée
par la cour d'assises, l'accusé, qui comparaissait libre, a pris
la fuite au cours de l'audience, le 3 avril 2012 ; que la cour a
délivré un mandat d'arrêt à son
encontre en application de l'article 379-2 du code de procédure
pénale et renvoyé l'examen de l'affaire à une audience
ultérieure ; que M. X... a, après avoir été remis à la France
par les autorités judiciaires portugaises en exécution d'un
mandat d'arrêt européen, été
incarcéré le 11 août 2012 sans être présenté à un juge des
libertés et de la détention ;
Attendu que, pour rejeter la demande de mise en liberté de M.
X... en écartant le grief tiré de ce qu'il n'avait pas été placé
sous mandat de dépôt par le juge
des libertés et de la détention, l'arrêt relève qu'un
mandat d'arrêt a été décerné à son
encontre, en application des articles 379-2 et 379-4 du code de
procédure pénale, après l'ouverture des débats devant la cour
d'assises, mais avant toute décision de condamnation, de telle
sorte que ledit mandat vaut
mandat de dépôt à son encontre ;
que les juges ajoutent qu'il n'y a pas lieu de se référer aux
dispositions de l'article 135-2 du code de procédure pénale, le
juge des libertés et de la détention étant incompétent pour
réformer ou apprécier la validité d'un titre de détention émis
par la cour d'assises ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, et alors que l'article
379-4 du code de procédure pénale était inapplicable en
l'espèce, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé
et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ; qu'elle aura lieu
sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer
directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi
que le permet l'article L. 411-3 du code l'organisation
judiciaire ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de
la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Grenoble, en
date du 23 octobre 2012 ;
CONSTATE que M. José X... est détenu sans titre depuis le 11
août 2012 et ordonne sa mise en liberté immédiate s'il n'est
détenu pour autre cause ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les
registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour
d'appel de Grenoble et sa mention en marge ou à la suite de
l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre
criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que
dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Louvel
président, M. Guérin conseiller rapporteur, Mme Guirimand, MM.
Beauvais, Straehli, Finidori, Monfort, Buisson, Mme Vannier
conseillers de la chambre, Mme Divialle, MM. Maziau, Talabardon
conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Cordier ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le
rapporteur et le greffier de chambre ;
Analyse
Publication :Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Grenoble , du 23 octobre 2012